FIXATION ET
VARIATIONS DE LOYER
Par
par Mme Corinne DELACRAUSAZ et
M. Jacques Ansermet,
Service juridique de la Chambre vaudoise
immobilière
Tables des
matières
Chapitre I:
GENERALITES
I.
Définition du loyer et des frais accessoires
Il. La
fixation du loyer: le principe de la liberté contractuelle et
ses limites pour les baux d'habitations et de locaux
commerciaux
A.
Introduction
B. Le
régime de la surveillance des loyers:
définition
C.
Champ d'application
D. Les
règles sur la fixation du loyer
1.
Principes
2. Le
modèle théorique légal
III.
Méthodes absolue et relative
A.
Définition
B.
Application
Chapitre Il : LA
MÉTHODE RELATIVE
I.
Quelques principes essentiels
A.
Dates de référence
B.
Réserves de hausse de loyer
Il.
L'effet des variations du taux hypothécaire sur les
loyers
A.
Taux hypothécaire déterminant
B.
Hausse du taux hypothécaire
C.
Baisse du taux hypothécaire
III.
L'influence de l'augmentation du coût de la vie sur les
loyers
IV.
Exemples de calcul, taux hypothécaire et indice suisse des
prix à la consommation
A.
Sans réserve de hausse de loyer
B.
Avec réserve de hausse de loyer
V.
L'influence de la hausse des charges d'exploitation et d'entretien
de l'immeuble sur les loyers
A. Les
charges d'exploitation ou charges courantes
B. Les
charges d'entretien
C.
Calcul
VI.
Les prestations supplémentaires du bailleur
A.
Définition
B.
Calcul en cas d'importants travaux àplus-value
C.
Synthèse en exemples
VII.
Exemple complet de calcul en méthode relative
VIII.
Les Loyers indexés
IX.
Les loyers échelonnés
Chapitre III: LA
METHODE ABSOLUE
I. Le
calcul du rendement admissible de l'immeuble
A. La
détermination des fonds propres
1.
Immeuble neuf
2.
Immeuble construit récemment ou immeuble ancien acquis
récemment
3.
Immeuble propriété d'une
sociétéimmobilière
4.
Immeuble ancien n'ayant pas changé récemment de
propriétaire
5.
Augmentation des fonds propres
postérieurementàl'acquisition
B. Les
charges financières réelles
C. Les
charges d'exploitation et d'entretien
D.
Résultat
E.
Exemples de calculs complets
II.
L'adaptation aux loyers usuels de la localité ou du
quartier
Chapitre IV:
REGLES DE FORME ET PROCEDURE
I.
Loyer initial
A. La
contestation du loyer initial
1.
Principe
2.
Procédure
B. La
formule officielle au changement de locataire
Il.
Hausse de loyer
A.
Notification de la hausse
1.
Formule officielle
2.
Délais
B.
Contestation de la hausse
III.
Baisse de loyer
A.
Principes
B.
Procédure
Annexe 1: Amortissement d'installations
Annexe 2: Tableau du taux d'amortissement en
fonction de la durée moyenne des travaux
Chapitre 1 : GENERALITES
I. Définition du loyer et des frais
accessoires
Le loyer est
la rémunération due par le locataire au bailleur pour la
cession de l'usage de la chose (art. 257 CO).
|
Le
loyer au sens large, ou loyer brut, comprend toutes les prestations
offertes par le bailleur (cession de l'usage de la chose,
chauffage, eau chaude, taxes communales, conciergerie, etc.). On
parle parfois également de "loyer tout compris".
Le
loyer au sens étroit, ou loyer net, ne vise pas les frais
accessoires qui sont dus séparément pour les prestations
fournies par le bailleur ou un tiers (la commune par exemple) en
rapport avec l'usage de la chose.
Exemple :
Loyer
net
:
CHF 1'500.--
Acompte de chauffage, eau chaude et frais accessoires
:
CHF 150.--
Total
:
CHF 1'650.--
Les frais accessoires pour les habitations et les
locaux commerciaux doivent correspondre aux dépenses
effectives du bailleur pour des prestations en rapport avec l'usage
de la chose (art. 257 a CO).
|
Exemples: eau froide (consommation et abonnement),
conciergerie, entretien du jardin, révision périodique de
l'ascenseur, etc.
Les
dépenses que le bailleur fait pour l'entretien de l'immeuble
ou qui ne sont pas en rapport avec l'usage de la chose louée
ne constituent en revanche pas des frais accessoires.
Exemples: impôt foncier, intérêts
hypothécaires, réparation de la chaudière,
etc.
Les
frais accessoires ne sont à la charge du locataire que si cela
a été convenu spécialement. Les postes effectifs
doivent être détaillés dans le contrat.
Exemple: le locataire participe, avec les autres locataires,
au paiement des charges de préférence et des taxes
publiques, telles que taxe d'épuration des eaux (entretien et
utilisation), taxe d'égout, taxe d'enlèvement des
ordures.
L'accord peut exceptionnellement résulter des
circonstances.
Exemple: machine à laver qui fonctionne avec des
pièces de monnaie.
Il. La fixation du loyer: le principe de la
liberté contractuelle et ses limites pour les baux
d'habitations et de locaux commerciaux.
A.
Introduction
Le
principe de la liberté contractuelle constitue l'une des
règles fondamentales du droit privé suisse.
L'art. 19 al. 1 CO a ainsi la teneur
suivante:
L'objet d'un contrat
peut être librement déterminé, dans les limites de
la loi.
|
Chacun
dispose en principe de la faculté ou non de contracter, et
à des conditions qui ne dépendent que du choix des
parties elles-mêmes.
Les
limites générales à cette liberté sont les
suivantes :
- article 2
CC : principe de la bonne foi et prohibition de l'abus de
droit
- article
27 CC : protection des droits de la personnalité
- article
20 CO : contrat impossible, illicite ou contraire aux moeurs
- articles
21 ss CO : lésion, erreur essentielle, dol, etc.
Dans
le cadre d'une économie normale de marché, les quelques
règles restrictives de la liberté contractuelle
mentionnées ci-dessus sont suffisantes pour protéger les
justiciables.
Quand
survient un déséquilibre trop accentué entre l'offre
et la demande d'un bien donné, il est nécessaire
d'instituer d'autres remèdes.
Cette
situation d'excédent de la demande par rapport à l'offre
de logements est à l'origine de
l'art. 109
al. 1 de la Constitution fédérale:
La
Confédération légifère afin de lutter contre
les abus en matière de bail à loyer, notamment les
loyers abusifs, ainsi que sur l'annulabilité des congés
abusifs et la prolongation du bail pour une durée
déterminée.
|
L'accroissement du besoin de logements s'est produit
principalement à cause d'une densité toujours plus faible
de l'occupation des habitations. Parallèlement, l'augmentation
des coûts de la construction et la limitation des zones à
bâtir ont renchéri les loyers des logements neufs.
L'Etat, approuvé par le peuple et les cantons, a ainsi
décidé de la nécessité d'une législation
spéciale pour permettre le maintien de logements à des
prix abordables.
B.
Le régime de la surveillance des loyers:
définition
Le
Code des obligations (art. 269 à 270 e CO) consacre le
système de la surveillance des loyers. Cette solution laisse
la place en principe à une libre formation des loyers. Le
locataire a toutefois le droit de contester auprès de
l'autorité compétente la fixation des
loyers.
Ce
régime s'oppose à celui du contrôle des loyers, qui
subordonne toute fixation des loyers à une autorisation
préalable d'une autorité.
Le
système en vigueur impose au locataire d'agir à certains
moments, et dans des délais donnés, pour contester le
loyer:
- lors de
la conclusion du bail (contestation du loyer initial: art. 270
CO);
- lors de
la notification d'une majoration de loyer (art. 270 b CO);
- sous
forme d'une demande de baisse de loyer (art. 270 a CO).
Si le
locataire n'agit pas à la date et dans le délai utile, le
loyer est tenu pour admissible.
C.
Champ d'application
La
protection contre les loyers abusifs (art. 269 ss CO) s'applique en
matière de baux d'habitations et de locaux
commerciaux.
Par
habitations, on entend tous les locaux dans lesquels les
activités humaines essentielles de séjourner, dormir,
cuisiner, manger, se laver... se déroulent.
Ainsi,
selon la jurisprudence, une chambre meublée constitue aussi
une habitation.
Par
locaux commerciaux, il faut comprendre les locaux qui servent
à l'exercice d'une activité humaine à but lucratif
ou idéal.
La
notion de local commercial doit être interprétée
dans un sens large, qui ne suppose pas nécessairement une
utilisation pour l'exercice d'une activité lucrative. Elle
comprend bien plutôt tous les locaux qui contribuent à
l'épanouissement de la personnalité du locataire d'un
point de vue privé ou économique.
Exemples : bureau, atelier, local servant à un
club de loisirs, garage utilisé par un mécanicien
qualifié comme un lieu de travail pour la réparation de
vieilles voitures.
Les
dispositions concernant la protection contre les loyers abusifs
s'appliquent aussi :
1) par
analogie aux baux à ferme non agricoles et autres contrats qui
visent principalement la cession à titre onéreux de
l'usage d'habitations ou de locaux commerciaux (art. 253 b al. 1
CO);
Exemple : bail à ferme portant sur un
café-restaurant.
2) aux
choses dont l'usage est cédé avec ces habitations ou
locaux commerciaux (art. 253 a al. 1 CO);
Exemples : garages ou places de parc loués en
relation avec un bail portant sur un appartement ou un local
commercial.
Le
critère décisif consiste dans le fait que, dans l'esprit
des parties, le bail portant sur I'"accessoire" n'aurait pas
été conclu sans celui du logement ou du local
commercial.
II
doit y avoir un rapport de connexité entre les locaux
loués et les choses cédées, rapport qui découle
de l'usage. Peu importe qu'il y ait deux baux séparés ou
que ceux-ci aient été conclus à des dates
différentes. Il faut par contre que les parties aux contrats
soient les mêmes.
Une
place de stationnement ou un garage loué indépendamment
d'un bail portant sur un logement ou un local commercial ne
constitue en revanche ni une habitation, ni un local
commercial.
Les
dispositions concernant la protection contre les loyers abusifs ne
s'appliquent pas:
1) aux
appartements de vacances loués pour trois mois ou moins (art.
253 a al. 2 CO);
2) aux
baux d'appartements et de maisons familiales de luxe comprenant six
pièces ou plus, cuisine non comprise (art. 253 b al. 2
CO);
La loi
pose deux conditions cumulatives :
- le
logement doit avoir au moins six pièces;
- il
doit avoir un caractère luxueux. C'est l'impression
donnée par l'ensemble du logement qui est déterminante;
une seule ou quelques caractéristiques luxueuses ne suffisent
pas. N'est luxueux que ce qui dépasse clairement la mesure
habituelle du confort : piscine, sauna, hall d'entrée
impressionnant, chambres particulièrement grandes, ascenseur
privé, environnement très protégé,
etc.
3) aux
locaux d'habitation en faveur desquels des mesures d'encouragement
ont été prises par les pouvoirs publics et dont le loyer
est soumis au contrôle d'une autorité (art. 253 b al. 3
CO);
Cette
limitation vaut dans les cas où les locaux financés par
des collectivités publiques appartiennent à des tiers.
Les articles 269 ss CO s'appliquent en revanche quand les
collectivités publiques sont bailleresses de tels
locaux.
D.
Les règles sur la fixation du loyer
1.
Principes
Le
législateur a écarté le système basé sur
l'offre et la demande, estimant que les particularités de
l'économie immobilière (bien de première
nécessité, demande peu élastique, rares
possibilités de substitution, frais de déménagement,
offre rigide en raison de la durée des constructions, zones
à bâtir encore disponibles toujours plus rares)
imposaient une intervention pour éviter des prix incompatibles
avec les moyens financiers de la majorité de la
population.
Pour
apprécier le loyer, le législateur a écarté
l'optique du locataire (le loyer correspond-il à l'usage
susceptible d'être retiré de la chose louée ?
Serait-il judicieux de fixer le loyer en fonction du revenu du
locataire ?) pour se placer du point de vue du
bailleur.
Le
système est envisagé sous deux angles
différents:
1) Le
principe est le suivant : le bailleur a droit à une
rémunération gui lui procure un rendement raisonnable par
rapport au capital investi. Il s'agit donc d'analyser la
quotité du bénéfice net que le bailleur tire du
loyer (après déduction des frais d'exploitation et de la
rémunération des capitaux empruntés) au regard de
son investissement dans les locaux faisant l'objet du
contrat.
Exemple:
X. a
acquis un immeuble pour 1 million. Il a emprunté CHF 600'000.-
et investi CHF 400'000.- de fonds propres. Son revenu locatif
annuel est de CHF 60'000.-. Il faut déduire:
a) les
intérêts hypothécaires: CHF 600'000.- x 4 % = CHF
24'000.-
b) les
charges courantes et d'entretien: CHF 21 '000.-
La
quotité de bénéfice net restant est de CHF 60'000.-
- (CHF 24'000.- + CHF 21'000.- ) = CHF 15'000.-
Par
rapport au capital propre investi, le rendement est donc de CHF
15'000.- x 100 = 3,75 %
CHF 400'000.-
Cette définition positive du système
est posée par l'art. 269 CO :Les loyers sont abusifs
lorsqu'ils permettent au bailleur d'obtenir un rendement excessif
de la chose louée ou lorsqu'ils résultent d'un prix
d'achat manifestement exagéré.
|
2) L'art. 269 a CO définit négativement
les cas dans lesquels un loyer n'est pas abusif:
Ne sont en règle générale pas
abusifs les loyers qui, notamment:
a. Se situent dans les limites des loyers
usuels dans la localité ou dans le quartier;
b. Sont justifiés par des hausses de
coOts ou par des prestations supplémentaires du
bailleur;
c. Se situent, lorsqu'il s'agit de
constructions récentes, dans les limites du rendement brut
permettant de couvrir les frais;
d. Ne servent qu'à compenser une
réduction du loyer accordée antérieurement
grâce au report partiel des frais usuels de financement et
sont fixés dans un plan de paiement connu du locataire
à l'avance;
e. Ne compensent que le renchérissement
pour le capital exposé aux risques;
f. N'excèdent pas les limites
recommandées dans les contrats-cadres conclus entre les
associations de bailleurs et de locataires ou les organisations qui
défendent des intérêts semblables.
|
2.
Le modèle théorique légal
Pour
comprendre les dispositions sur les adaptations de loyer, il faut
savoir que le Conseil fédéral a opéré une
fiction concernant la répartition du capital investi entre
fonds propres et fonds empruntés. Dans son modèle,
l'immeuble a été financé à raison de
:
- 40 % par
des fonds propres;
- 60 % par
des fonds empruntés.
En
outre, selon le Conseil fédéral (il s'agit d'une seconde
fiction) :
- 70 % du
loyer sert à renter le capital (propre et emprunté);
- 30 % du
loyer sert à couvrir les charges courantes et
d'entretien.
Schématiquement, le loyer couvre les
éléments suivants :
> Rendement des fonds propres
(70 x 40%)
28 %
> Charges courantes et
d'entretien 30%
> Intérêts
hypothécaires (70 x 60%) 42%
III. Méthodes absolue et
relative
A.
Définition
La
méthode de calcul absolue du loyer se réfère
à l'objet loué. Elle consiste à apprécier le
loyer en soi, à analyser son caractère admissible ou
abusif à une date donnée sans se préoccuper du
montant du loyer précédemment en vigueur.
Elle
s'applique dans les trois cas suivants:
1)
Lors de l'examen du rendement admissible ou excessif de la chose
louée ou pour établir si le loyer résulte d'un prix
d'achat manifestement exagéré (art. 269 CO).
2)
Lors de l'examen de l'admissibilité du loyer par rapport au
critère des loyers du quartier ou de la localité (art.
269 a litt. a CO).
3)
Pour examiner, s'agissant de constructions récentes, si le
loyer se situe dans les limites du rendement brut permettant de
couvrir les frais (art. 269 a litt. c CO).
La
méthode de calcul relative se réfère au
contrat de bail liant les parties. Elle consiste à analyser le
loyer par rapport à sa dernière fixation.
Elle
prend en considération l'évolution dans le temps du
loyer. On n'examine pas si le loyer en cause est en soi abusif,
mais s'il l'est devenu, en raison des modifications des
différents paramètres invoqués par les
parties.
Dans
le cadre de cette méthode, le dernier loyer fixé
conventionnellement est réputé avoir procuré au
bailleur, en vertu du principe de la confiance, une couverture
convenable de ses charges et un rendement normal du capital investi
dans l'immeuble, de sorte qu'il suffit de tenir compte des
modifications des bases de calcul survenues depuis la dernière
fixation du loyer pour déterminer le nouveau loyer
admissible.
Pour
ne pas être abusive, une majoration de loyer doit être
justifiée par les critères suivants, alternativement ou
cumulativement:
1)
Augmentation des coûts (art. 269 a litt. b CO);
2)
Prestations supplémentaires du bailleur (art. 269 a litt. b
CO);
3)
Hausse de l'indice suisse des prix à la consommation (art. 269
a litt. e CO).
B.
Application
Le
Code des obligations ne règle pas dans quels cas les
méthodes absolue et relative doivent trouver application. Il
se borne à préciser, en note marginale, que l'art. 269 CO
constitue la règle et l'art. 269 a CO les
exceptions.
La
jurisprudence en la matière est la suivante :
1)
En cas de contestation du loyer initial
Le
loyer initial est généralement fixé en application
de la méthode absolue, soit après calcul du rendement de
la chose louée ou en fonction des loyers usuels dans la
localité ou le quartier.
Le
bailleur peut néanmoins également motiver le loyer
initial selon la méthode relative.
En cas
de contestation du loyer initial, les indications du bailleur quant
à la méthode de fixation du loyer fixent le cadre des
débats. Ainsi, si le bailleur indique des critères
relatifs, le juge ne se référera pas à la
méthode absolue, sauf si le locataire réclame un tel
examen.
2)
En cas de hausse de loyer
Il
faut distinguer les deux situations suivantes :
a)
Hausse motivée par des critères relatifs
Même si la hausse de loyer est justifiée en
fonction de l'évolution du taux hypothécaire, de l'IPC,
des charges de l'immeuble et des éventuels travaux à plus
value, le locataire peut demander que l'admissibilité du loyer
soit contrôlée au regard de la méthode
absolue.
De
plus, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, en cas
d'immeubles construits ou acquis récemment, la hiérarchie
entre critères absolus doit être inversée par
rapport à celle prévalant pour les immeubles
récents. Un loyer augmenté selon un critère relatif,
entrant dans les limites des loyers usuels du quartier, ne peut
alors pas être contesté selon le critère du
rendement.
b)
Hausse motivée par des critères absolus
Le
Tribunal fédéral ayant relativisé la méthode
absolue, le bailleur ne peut l'invoquer pour augmenter le loyer que
si les circonstances se sont modifiées depuis la dernière
fixation du loyer.
Ont
été admises les circonstances suivantes permettant
d'invoquer la méthode absolue en cours de bail :
-
Changement de propriétaire, en cas de vente de
l'immeuble;
- Immeuble
sortant du contrôle administratif des loyers;
-
Formulation valable d'une réserve de hausse de loyer;
- Existence
d'un cas particulier justifiant l'application de la méthode
absolue si le bailleur a préalablement épuisé toutes
les facultés de hausse résultant de l'art. 269 a CO;
- Dans le
cadre d'un bail indexé ou échelonné, à
l'expiration de la période d'indexation ou
d'échelonnement.
N'ont
par contre pas été considérées comme des
circonstances particulières justifiant une augmentation
basée sur la méthode absolue les circonstances
ci-après:
-
Changement de propriétaire sans changement de bailleur;
- Transfert
d'immeuble dans le cadre d'un héritage.
3)
En cas de demande de baisse de loyer
Selon
l'art. 270 a CO, suite à une modification notable d'une base
de calcul, le locataire peut demander une baisse de son loyer, s'il
a une raison d'admettre que la chose louée procure au bailleur
un rendement excessif au sens des art. 269 et 269 a
CO.
Le
bailleur peut opposer à une demande de baisse fondée sur
des facteurs relatifs d'autres facteurs relatifs. Ainsi, la baisse
du taux hypothécaire de référence peut,
partiellement ou totalement, être compensée par la hausse
de l'indice suisse des prix à la consommation, par la hausse
des charges d'exploitation et d'entretien de l'immeuble, ainsi que
par d'éventuels travaux à plus-value.
Le
bailleur peut également refuser d'octroyer une baisse de loyer
fondée en méthode relative en invoquant l'application de
la méthode absolue.
Chapitre 2 : LA
MÉTHODE RELATIVE
I.
Quelques principes essentiels
A.
Dates de référence
La
méthode relative se basant sur l'évolution du loyer dans
le temps, il est fondamental de connaître les dates de
référence pour la détermination des critères de
fixation du loyer (taux hypothécaire, indice des prix à
la consommation, charges d'exploitation et d'entretien, travaux
à plus-value).
Ce
sont les critères connus au moment de la conclusion du
contrat, de la notification de la hausse ou de la demande de baisse
de loyer qui sont déterminants.
En
pratique, les nouveaux taux hypothécaires sont pris en
considération dès qu'ils sont annoncés dans la
presse, à condition qu'ils entrent en vigueur avant ou en
même temps que la modification du loyer.
Exemples:
1)
Bail avec échéance au 1er mai et délai de
résiliation de 3 mois.
Le 9
novembre 1999, la presse annonce une hausse du taux
hypothécaire de 4 à 4.5 % dès le 1er février
2000. Lors de la notification de la majoration de loyer le 10
janvier 2000, le taux connu et déterminant pour le calcul est
4.5 %.
2) Le
contrat a été signé le 20 novembre 1999. Il entre en
vigueur le 1er janvier 2000. Le taux hypothécaire connu et
déterminant est 4 % (le taux hypothécaire de 4% %
n'était pas encore entré en vigueur le 1er janvier
2000).
Pour
faciliter les calculs, il convient d'indiquer sur le bail les
critères retenus lors de sa conclusion.
B.
Réserves de hausse de loyer
Dans
le cadre de la méthode relative, le bailleur ne peut prendre
en considération que l'évolution des critères de
fixation du loyer (taux hypothécaire, indice des prix à
la consommation, charges d'exploitation et d'entretien, travaux
à plus-value) depuis la dernière fixation du loyer. Il ne
peut pas remonter plus loin dans le temps et utiliser des facteurs
de hausse non répercutés lors de la dernière
adaptation du loyer.
Le
bailleur qui ne souhaite pas appliquer toute la hausse de loyer
possible doit, pour pouvoir s'en prévaloir à l'occasion
d'une hausse ou d'une baisse ultérieure, formuler une
réserve de hausse de loyer sur le contrat de bail initial ou
sur la notification de hausse.
La
réserve doit être portée à la connaissance du
locataire de manière à ce qu'il comprenne que le bailleur
pourra se prévaloir ultérieurement des éléments
indiqués. Elle doit être claire et explicite. Il est
ainsi nécessaire d'exprimer, en francs ou pour cent du loyer,
le montant de la majoration auquel le bailleur renonce (art. 18
OBLF).
Conformément à la jurisprudence, toute
équivoque dans la formulation de la réserve se retourne
contre son auteur.
Exemple de réserve de
hausse:
Hausse totale possible
: CHF
100.--
Hausse pratiquée
:
CHF 60.--
Réserve de hausse de loyer: CHF
40.--
Ne
sont pas des réserves selon la jurisprudence:
- une
réserve non exprimée en francs ou en pour cent;
- une
réserve tacite;
Exemple: le fait de ne pas utiliser un critère de
hausse.
-
l'indication d'un taux hypothécaire ou d'un indice du
coût de la vie inférieur au taux hypothécaire ou
à l'indice du coût de la vie valable au moment de la
conclusion d'un bail, de la notification d'une hausse ou lors d'une
demande de baisse de loyer, sous réserve de l'application de
l'art. 13 al. 4 OBLF pour le taux hypothécaire;
-
l'indication "frais d'exploitation et d'entretien arrêtés
au ...".
Il. L'effet des variations du taux
hypothécaire sur les loyers
A.
Taux hypothécaire déterminant
Le
bailleur ne peut pas utiliser son propre taux hypothécaire
pour calculer une adaptation de loyer. Dans le canton de Vaud,
c'est le Conseil d'administration de la Banque Cantonale Vaudoise
qui fixe le taux hypothécaire de référence pour le
calcul des loyers.
B.
Hausse du taux hypothécaire
Les
incidences des modifications du taux hypothécaire sur les
loyers sont fixées à l'art. 13 al. 1 OBLF :
Une
augmentation du taux hypothécaire de J4 pour cent donne
droit, en règle générale, à une hausse
maximum de loyer de :
a. 2
pour cent quand les taux hypothécaires dépassent 6
pour cent;
b. 2,5 pour cent quand les taux hypothécaires
se situent entre 5 et 6 pour cent;
c. 3
pour cent quand les taux hypothécaires sont
inférieurs à 5 pour cent.
Le
Conseil fédéral a fixé les pourcentages
déterminants en se fondant sur le modèle théorique
légal (cf. chapitre l, Il D 2.).
Exemples:
1)
Lorsque le taux hypothécaire passe de 6 à 6,5 %,
l'augmentation est de (6,5 - 6) x 100 = 8,33 %
6
Cette
augmentation n'influence que le 42 % (70 % x 60 %) du
loyer:
42 % x
8,33 % = 3,49 %
Le
Conseil fédéral a arrondi ce montant à l'unité
supérieure, soit 4 %.
2)
Quand le taux hypothécaire passe de 5,5 à 5,75 %,
l'augmentation est de (5,75 - 5,5) x 100 = 4,54
%
5,5
Cette
augmentation n'influence que le 42 % du loyer:
42 % x
4,54 % = 1,9 %
Le
Conseil fédéral a arrondi aussi vers le haut, soit
jusqu'à 2,5 % (!).
La
hausse du loyer engendrée par l'augmentation du taux
hypothécaire peut être représentée ainsi
:
A %
De %
|
3.25 %
|
3.50 %
|
3.75%
|
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En
outre, selon l'art. 13 al. 4 OBLF, il faut tenir compte des
variations antérieures du taux hypothécaire:
Lors d'une modification de loyer faisant suite à
une variation du taux hypothécaire, il y a lieu de
voir en outre si et dans quelle mesure les variations
antérieures ont entraîné une modification du
loyer.
L'application de cette disposition est toutefois
considérablement limitée par la
jurisprudence.
En
effet, selon le Tribunal fédéral, l'examen des variations
antérieures du taux hypothécaire ne peut remonter
au-delà :
- de la
conclusion du contrat de bail;
- d'une
modification consensuelle du loyer;
- d'un
jugement ou d'une transaction ayant pris en compte l'évolution
du taux hypothécaire;
- de la
fixation du loyer selon la méthode absolue;
- de la
dernière augmentation de loyer non contestée fondée
sur la variation du taux hypothécaire.
C. Baisse du taux hypothécaire
En cas
de baisse du taux hypothécaire, l'art. 13 al. 1 OBLF indique
les éléments suivants:
S'il se produit une baisse du taux
hypothécaire, le loyer doit être réduit en
proportion, à moins que les économies qui en
résultent pour le bailleur soient contrebalancées par une
hausse des coûts.
Le
mode de calcul est alors le suivant:
Taux
de réduction du loyer en % = 100 x augmentation du loyer en
%
loyer augmenté en %
Exemple: lorsque le taux passe de 7 à 6 % : 100 x 8
% = 800 = 7,41 %
108 % 108
La
baisse du loyer engendrée par la diminution du taux
hypothécaire peut être représentée
ainsi:
A %
De %
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3.25 %
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3.50 %
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3.75%
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A une
demande de baisse de loyer fondée sur une diminution du taux
hypothécaire, le bailleur peut opposer en compensation
:
- les
autres critères découlant de la méthode relative,
soit:
-
l'évolution de l'indice suisse des prix à la
consommation;
- la
hausse des charges d'exploitation et d'entretien de
l'immeuble;
- les
travaux à plus-value éventuels;
- les
loyers usuels dans la localité ou le quartier;
- le
rendement insuffisant.
Le
bailleur peut également faire valoir en compensation les
réserves qu'il a effectuées valablement lors des
précédentes notifications de hausse de
loyer.
III. L'influence de l'augmentation du coût
de la vie sur les loyers
Selon
l'art. 16 OBLF, le bailleur ne peut répercuter sur le loyer
que le 40 % de la hausse subie par l'IPC depuis la dernière
fixation du loyer.
Exemple: dernière fixation du loyer le 10 juillet 2001,
IPe = 102.0 points
calcul
le 10 juillet 2005, IPe = 104.7 points
(104.7 - 102.0) x 100 = 2,7 x 100 = 2,65
%
102.0
102.0
dont
il faut prendre les 40 % :
2,65 x
40 = 1,06 %
100
IV. Exemples de calcul, taux hypothécaire
et indice suisse des prix à la consommation
A.
Sans réserve de hausse de loyer
Signature du
bail:
15 mai 1999
Loyer:
Fr. 1'000
Échéance
annuelle:
Le 1er juin
Délai de résiliation
:
3 mois
1.
Calcul de la 1ère modification du loyer, début
février 2000
Hausse du taux hypothécaire :
Mai
1999: 4 %
Février 2000: 4,5 %
soit
0.5 % de hausse du taux qui représente 6 % d'augmentation du
loyer.
Evolution de l'IPC :
Mai
1999 : 104.7
points
Février 2000 105.7
points
1.0 points
soit
0,96 % d'augmentation dont le 40 % peut être
répercuté sur le loyer, à savoir 0,38
%.
Récapitulation :
Taux
hypothécaire : 6
%
IPC
:
0,38 %
Hausse
totale
6,38 % ou Fr. 64.--
d'où un loyer de Fr. 1'064.- dès le 1er juin
2000.
2.
Calcul de la 2ème modification du loyer, début
février 2001
Taux
hypothécaire:
Février 2000: 4,5
%
Février 2001 : 4,5 %
soit
sans modification
Evolution de l'IPC
:
Février 2000 : 105.7
points
Février 2001 : 107.1 points
1.4 points
soit
1,32 % dont le 40 % peut être répercuté sur le
loyer, à savoir 0,53 %.
Récapitulation :
Taux
hypothécaire
:
+ 0,00 %
IPC
:
+ 0,53 %
Hausse
totale
+ 0,53 % ou Fr. 6.--
d'où un loyer de Fr. 1'070.- dès le 1er juin
2001.
3.
Calcul de la 3ème modification du loyer, début
février 2002
Baisse du taux hypothécaire :
Février 2001 : 4,5
%
Février 2002 : 4 %
soit
une baisse
de
- 5,66 %.
Evolution de l'IPC :
Février
2001
107.1 points
Février
2002
107.6 points
0.5 points
soit
0,47 % d'augmentation dont le 40 % peut être
répercuté sur le loyer, à savoir 0,19
%.
Récapitulation :
Taux
hypothécaire
- 5,66 %
IPC
+ 0,19 %
Baisse
totale
- 5,47 % ou Fr. 59.--
d'où un loyer de CHF 1'011.- dès le 1er juin
2002.
B.
Avec réserve de hausse de loyer
Dans
le même exemple que ci-dessus, le bailleur a établi dans
le bail une réserve de hausse de loyer de CHF 50.-, en plus du
loyer de CHF 1'000.-.
1.
Calcul de la 1ère modification du loyer, début
février 2000
Hausse du taux hypothécaire:
Mai
1999 : 4 % Février 2000 : 4,5 %
soit %
% de hausse du taux qui représente 6 % d'augmentation du
loyer.
104.7
points
105.7
points
1.0
points
soit
0,96 % d'augmentation dont le 40 % peut être
répercuté sur le loyer, à savoir 0,38
%.
Récapitulation :
Taux
hypothécaire
IPC
Hausse
totale
6
%
0,38%
6,38
%
La
hausse de 6,38 % doit être calculée sur le loyer total
possible, à savoir Fr. 1'000.- +
Fr.
50.- =Fr. 1'050.-
Fr.
1'050 x 6,38 % = Fr. 67.-
L'augmentation totale possible s'élève ainsi à
Fr. 67.-- plus Fr. 50.- (réserve) = Fr. 117.-.
Le
bailleur décide de ne majorer le loyer que de Fr. 60.-
(nouveau loyer = Fr. 1'060.-) et de
réserver Fr. 57.-.
2.
Calcul de la 2ème modification du loyer, début
février 2001
Taux
hypothécaire:
Février 2000 : 4,5 %
soit
sans modification
Evolution de l'IPC :
Février 2001 : 4,5 %
Février 2000
Février 2001
105.7
points
107.1
points
1.4
points
soit
1,32 % dont le 40 % peut être répercuté sur le
loyer, à savoir 0,53 %.
Récapitulation :
Taux
hypothécaire
IPC
Hausse
totale
+ 0,00
%
+ 0,53
%
+ 0,53
%